Le dispositif « 100 patients complexes » met en lumière le travail des équipes de soins primaires et explore de nouvelles façons de les soutenir.
La prise en charge des patients dits « complexes » repose souvent sur l’engagement de médecins de premier recours, confrontés à une charge administrative croissante, à des interactions difficiles avec les services sociaux et les soins à domicile, ainsi qu'à un manque de reconnaissance de leur rôle. « Ces professionnels doivent composer avec des conditions de travail exigeantes, une rémunération insuffisante, voire des tensions avec certains acteurs du système, notamment les assurances » souligne le Dr Nicolas Perone, coordinateur du projet avec le Dr Marc-André Raetzo.
Si une approche collaborative et interprofessionnelle facilite la coordination et la qualité du suivi, la fragmentation actuelle du système de soins et des mécanismes de remboursement demeure un frein majeur à sa mise en œuvre efficace.
C’est dans ce contexte qu’a été développé le projet « 100 patients complexes », en partenariat avec l’OFSP (Office fédéral de la santé publique), le Réseau Delta et Prism (Promotion des réseaux intégrés des soins aux malades). Ce dispositif vise à apporter un soutien aux médecins dans leur prise en charge de ces patients, notamment via :
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Un financement de la coordination,
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Une aide à la constitution et la formation d’une équipe de soins stable,
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Un outil informatique pour faciliter la communication et la coordination de l’équipe de soins.
Le projet comprend par ailleurs un volet d’étude destiné à documenter de manière rigoureuse et transparente ce que les médecins accomplissent déjà au quotidien, souvent dans des conditions difficiles. En réunissant des professionnels engagés dans la coordination des parcours, il s’agit de mettre en évidence — chiffres et analyses à l’appui — la valeur ajoutée de cette approche centrée sur l’équipe de soins, avec le patient, ses proches et tous les soignants, afin de mieux la soutenir dans les modèles actuels de financement.
« Ce projet ne cherche pas à changer la manière de travailler des médecins, mais à documenter et valoriser ce qu’ils font déjà, avec rigueur et transparence, afin de convaincre les décideurs et les financeurs », explique le Dr Nicolas Perone.
Soutenir et mesurer le travail d’équipe
Le projet « 100 patients complexes » propose également un cadre méthodologique commun permettant de mesurer la dynamique interprofessionnelle sans alourdir la charge clinique. L’évaluation porte sur trois dimensions : la complexité des situations, la dynamique d’équipe et les effets médico-économiques.
Chaque équipe bénéficiera d’un outil numérique dédié (Sokle) pour élaborer et suivre un plan de soins partagé. Des formations ciblées, un coaching interprofessionnel et des cercles de qualité complètent le dispositif afin d’accompagner l’ensemble des professionnels — médecins, assistantes médicales et infirmières — dans cette démarche collaborative.
Enfin, les prestations de coordination, essentielles au fonctionnement de l’équipe, seront prises en charge par le projet.
Un engagement collectif au service des soins primaires
Avec l’ambition de suivre une centaine de situations cliniques complexes, le projet s’adresse aux médecins de premier recours, aux maisons de santé, aux cabinets de groupe et aux centres médicaux. Soutenu par l’Office cantonal de la santé (OCS) et financé en partie par l’Office fédéral de la santé publique (OFSP), il bénéficie d’un appui institutionnel.
Un volet scientifique, conduit par l’Université de Genève, analysera les leviers et freins à la mise en œuvre du travail interprofessionnel.
« Nous voulons rendre visibles les pratiques exemplaires déjà existantes, pour obtenir la reconnaissance politique et financière d’un modèle de soins plus équitable et mieux coordonné », ajoute le Dr Perone.
Les patients dits « complexes » représentent 5% de la population, mais génèrent à eux seuls 50% des coûts de la santé.