L’augmentation de la franchise minimale, récemment votée par l’Assemblée fédérale, est présentée comme un levier de maîtrise des coûts. En réalité, c’est une mesure à courte vue, qui pénalise les plus fragiles et aggrave le renoncement aux soins. En Suisse, près d’un assuré sur cinq déclare déjà avoir renoncé à des soins pour des raisons financières. Ce chiffre, en hausse constante, devrait suffire à alerter.
On prétend « responsabiliser » les patients, comme s’ils abusaient du système. Or, la Suisse affiche un taux de consultation médicale inférieur à la moyenne de l’OCDE, et une proportion des paiements provenant directement de la poche du patient la plus importante de l’OCDE. Ce ne sont pas les patients qui abusent, mais le système qui dysfonctionne, notamment en raison du manque d’accès à une première ligne efficace et d’un modèle de financement centré sur l’acte, et non sur les besoins réels de santé.
Augmenter la franchise, c’est ajouter une barrière financière qui touche d’abord les personnes âgées et les malades chroniques. C’est repousser des soins essentiels, au risque de complications plus graves et coûteuses à long terme. Une étude mandatée par l’OFSP confirme d’ailleurs une corrélation claire entre faibles revenus et non-recours aux soins.
Face à cela, le vote des deux chambres apparaît moins comme une stratégie de santé publique que comme un abandon politique. Une réforme véritable passerait par la remise en question du paiement à l’acte, et l’introduction de modèles incitatifs fondés sur la qualité, la prévention et la coresponsabilité entre prestataires et assureurs.
Faire reposer l’effort sur les plus vulnérables n’est ni équitable, ni efficace. Il est temps d’ouvrir un autre chemin : celui d’une santé solidaire, accessible et durable.