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Motion parlementaire « STOP à une médecine à deux vitesses ! » Le Réseau Delta entendu en tant qu'expert

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Motion parlementaire « STOP à une médecine à deux vitesses ! » Le Réseau Delta entendu en tant qu'expert Motion parlementaire « STOP à une médecine à deux vitesses ! » Le Réseau Delta entendu en tant qu'expert

Le 23 juillet dernier, le Réseau de soins Delta a été invité par la Commission de la santé de Genève dans le cadre d'une motion visant à améliorer l'accès à la prévention cardiovasculaire. Cette séance a été l'occasion de rappeler aux députés l'importance du médecin traitant et plus largement d'un renforcement du système de santé primaire pour répondre aux enjeux comme la prévention et l'accessibilité au soins.

Découvrez l'ensemble de l'argumentaire du Réseau Delta.

Le Réseau de soins Delta a été invité le 23 août par la Commission de la santé afin de présenter le point de vue du Réseau sur la motion « STOP à une médecine à deux vitesses ! ».

Ce texte récapitule la position du Réseau Delta sur les propositions de cette motion, à savoir :

  • Instaurer des consultations de prévention des maladies cardiovasculaires pour les personnes de 40 à 55 ans, entièrement couvertes par l'assurance obligatoire sans franchise, avec une priorité d'accès accordée aux personnes à faible revenu.

  • Améliorer l’accès aux soins pour réduire les inégalités, en s’inspirant des programmes de dépistage existants.

  • Renforcer la médecine de premier recours pour une prévention efficace et une réduction durable des coûts de la santé.

Position du Réseau Delta sur la motion

Les réflexions et la position du Réseau Delta sur la motion ont été organisées en trois axes :

  1. Le plan politique

  2. Le plan clinique

  3. L’impact pour les citoyens


  1. Le plan politique

Le texte proposé vise à renforcer le système de santé primaire en :

  • Encourageant une approche proactive en mettant l'accent sur la prévention des maladies cardiovasculaires. Actuellement, le système est souvent trop réactif et centré sur l’hôpital.

  • Soutenant et valorisant le rôle central des soins de première ligne en impliquant les médecins généralistes dans la mise en œuvre de ces consultations Cela aide à établir une relation continue entre les patients et leurs médecins, permettant une meilleure gestion des risques de maladies et une intervention précoce.

  • Visant à réduire les inégalités d'accès aux soins, garantissant que même les populations les plus vulnérables, celles qui renoncent le plus souvent aux soins, puissent bénéficier de soins préventifs essentiels, ce qui renforce l'inclusivité du système de santé primaire.

Position de Delta

Cette motion soutient une approche qui renforce le système de santé primaire en intégrant par ailleurs des pratiques de prévention qui sont essentielles pour la santé publique à long terme.

Les soins de santé primaire représentent une solution efficace pour préserver la santé, gérer les maladies et optimiser l'efficacité du système de santé.

Le Réseau de soins Delta appuie cet aspect de la motion en soulignant l'importance capitale du renforcement des soins de santé primaire dans une optique de durabilité du système de santé.

Nous relevons toutefois que la prise en charge par l’assurance obligatoire des soins de consultations spécifiques dans le cadre d’un programme de dépistage dans toute la population de 40 à 55 ans nécessiterait une modification de l’article 12e OPAS. Des actions cantonales pourraient déjà être envisagées, avec le soutien de l’Etat, en attendant une potentielle adaptation du catalogue de la LAMal.

  1. Le plan clinique

Le Réseau Delta rappelle que la prévention de manière générale est essentielle pour réduire l'incidence des maladies, ce qui à terme :

  • Diminue la pression sur les infrastructures de soins secondaires et tertiaires.

  • Evite des coûts plus élevés associés à des traitements tardifs ou à des complications.

Concernant la prévention des maladies cardiovasculaires, l'efficacité des programmes de prévention cardiovasculaire a été étudiée dans différents pays, et plusieurs initiatives ont montré des résultats positifs en termes de :

  • Diminue la pression sur les infrastructures de soins secondaires et tertiaires.

  • Evite des coûts plus élevés associés à des traitements tardifs ou à des complications.

Concernant la prévention des maladies cardiovasculaires, l'efficacité des programmes de prévention cardiovasculaire a été étudiée dans différents pays, et plusieurs initiatives ont montré des résultats positifs en termes de :

  • Identification et traitement des FRCV qui permet de conduire à une réduction de la mortalité par maladie cardio-vasculaire

  • Impact économique favorable à long terme (réduction des hospitalisations et des traitements coûteux)

Toutefois, il est important de noter que la plupart des programmes de prévention cardiovasculaire efficaces utilisent une combinaison d'approches pour aborder différents aspects du risque cardiovasculaire, plutôt que de se concentrer sur une seule intervention. Ces approches sont très variées, parfois populationnelles ou plus individuelles, et comprennent des mesures touchant différents aspects des déterminants sociaux de la santé.

  • Éducation et Sensibilisation (Campagnes publiques, Formation des professionnels de santé)

  • Interventions (Dépistage, Gestion des maladies chroniques)

  • Mesure de modification du comportement (Programmes de cessation du tabac, Encouragement à l'activité physique, Interventions sur l'alimentation, Soutien psychosocial (gestion du stress))

  • Politiques publiques favorisant la santé cardiovasculaire (Réglementations plus strictes sur le tabac ou des taxes sur les boissons sucrées, Initiatives législatives : comme celle qui nous intéresse ce soir.)

Position de Delta :

Les programmes de prévention cardiovasculaire, lorsqu'ils sont bien conçus et mis en œuvre, sont efficaces pour réduire les facteurs de risque, la morbidité, et la mortalité associées aux maladies cardiovasculaires.

Le Réseau Delta soutient l'implémentation de mesures de prévention et observe que les propositions sont alignées avec les recommandations d'EPIPEV 2024 ainsi qu'avec les principes de la smarter medicine et le concept de less is more.

Toutefois, il relève que l’approche multidimensionnelle est importante. Les initiatives comme celle présenté dans cette motion vont dans le bon sens mais ne sont peut-être pas suffisante pour permettre d’avoir l’impact désiré.

  1. Impact pour les citoyens

La motion « STOP à une médecine à deux vitesses ! » offre plusieurs avantages significatifs pour les citoyens :

  • Un accès amélioré aux soins préventifs pour les plus vulnérables car la motion réduit les obstacles financiers à la prévention.

  • Il s’agit d’une mesure de prévention efficace qui réduit le nombre de cas graves ainsi que la mortalité liée à ces maladies.

  • En impliquant les médecins de premier recours dans la mise en œuvre des consultations préventives, la motion représente une occasion pour le patient d’avoir un moment privilégié pour échanger sur d’autres aspects liés à sa santé.

Position de Delta :

Le Réseau Delta soutient les avantages proposés aux citoyens, mais s'interroge sur l'impact de l’initiative. « Les personnes visées profiteront-elles vraiment des mesures mise en place ? »

En effet, selon l’article « renoncement aux soins de santé en Suisse » de M. de Mestral, les facteurs prédictifs de renonciation aux soins était le fait d’être étranger et à faible niveau de formation. Il est légitime de se questionner sur la portée de l’initiative si nous sommes avant tout face à un problème culturel, d'éducation et/ou de littératie.

Aussi, selon le même article, on apprend que « les personnes atteintes d'une maladie cardiovasculaire étaient 55% plus susceptibles de renoncer à des soins de santé que celles n'ayant aucune maladie cardiovasculaire... ». Cela semble indiquer qu’il y a sans doute d’autres problématiques que financière ?

A ce titre, une analyse plus poussée des motifs réels de renonciation aux soins serait utile.

Conclusion

Face à l’évolution épidémiologique et démographique, aux défis socio-économiques, ainsi qu’aux enjeux d’accessibilité et de pénurie de soignants, le Réseau Delta appelle à de nouvelles formes d’organisation du système de santé pour garantir sa durabilité et maintenir un accès équitable pour toutes et tous. Dans cette perspective, il est crucial de réorienter un système de santé très technique et fragmenté, centré sur les soins et les prestations, vers une organisation plus intégrée qui privilégie une approche globale et coordonnée. Cette nouvelle orientation devrait mettre l'accent sur la proximité et les mesures de santé publique afin de mieux répondre aux besoins de la population. Un tel modèle valorise la santé primaire et souvent la médecine de famille, éléments essentiels pour un système de santé solidaire et durable.

Dans cette motion, l'accent mis sur la prévention, l'équité d'accès aux soins et l'utilisation des infrastructures existantes pour mettre en place un dépistage systématique des maladies cardiovasculaires est non seulement pertinent, mais aussi nécessaire pour réduire les inégalités et améliorer la santé globale de la population.

C’est la raison pour laquelle le Réseau Delta est plutôt favorable à cette motion car elle répond à des besoins critiques de santé publique en Suisse.

Cependant, quelques ajustements et clarifications pourraient renforcer encore plus cette proposition.

  • Privilégier une approche multimodale de la prévention en intégrant d’autres mesures efficaces et prouvées en s’inspirant des expériences internationales.

  • Préciser les populations cibles qui bénéficieraient e plus de la mesure, étant entendu que le renoncement n’est pas dû qu’à des questions financières.

  • Se questionner sur l’impact de la mesure, et prévoir d’effectuer une évaluation médico- économique une fois le dispositif déployé.

  • Etendre le partenariat à d’autres professionnels de santé (personnel infirmier, pharmacie, etc.).

  • Proposer un financement transitoire en attendant une prise en charge par la LAMal ?