Publication scientifique

Qu’est-ce qui détermine les dépenses de santé en Suisse ?

Delta Echos #2

Qu’est-ce qui détermine les dépenses de santé en Suisse ? Qu’est-ce qui détermine les dépenses de santé en Suisse ?

Une équipe de chercheurs a analysé les dépenses de santé relatives à 48 maladies entre 2012 et 2017 en Suisse. Explications avec Michael Stucki, économiste de la santé à la Haute école spécialisée de Zurich et à l’Institut d'économie de la santé de Winterthur.

Méthode

Les chercheurs ont décomposé les dépenses de santé en 48 maladies, blessures et autres affections majeures, 20 services de santé, 21 groupes d'âge et le sexe des patients. Ils ont utilisé des données provenant d'une multitude de sources, telles que les registres des patients hospitalisés, les données des assurances maladie et accident et les enquêtes de population. L’influence de quatre facteurs de dépenses a été analysée : la croissance démographique, l'évolution de la structure de la population (répartition par âge/sexe), l'évolution de la prévalence de la maladie et celle des dépenses par patient.

Résultats

Les troubles mentaux constituaient le groupe de maladies le plus coûteux à la fois en 2012 et en 2017 (respectivement 16,1 et 14,3 %), suivis par les troubles musculo-squelettiques (respectivement 12,8 et 13,8 %) et les troubles neurologiques (respectivement 9,4 et 8,5 %). À noter que les coûts analysés incluaient les soins de longue durée et les prestations non couvertes par l’assurance obligatoire. Les dépenses totales de santé ont par ailleurs augmenté de 19,7 % entre 2012 et 2017. L'augmentation des dépenses par patient en était la première cause, suivie par les changements dans la taille de la population (augmentation du nombre d’habitants), dans sa structure (vieillissement de la population notamment) et la prévalence de certaines maladies.

Discussion

Le plus grand défi auquel les chercheurs ont été confrontés a été d’obtenir des données contenant des informations croisant les diagnostics et les dépenses de santé, pour toutes les personnes concernées, par groupe d'âge et par sexe. Or peu de données sur les services ambulatoires rendent cela possible. Si les données de facturation des assureurs-maladie constituaient par exemple une source de renseignements importante, celles-ci n’ont pu être associées à des diagnostics, car elles ne sont pas systématiquement codées. Les chercheurs ont donc identifié les maladies traitées de façon indirecte, sur la base des traitements prescrits. Cette stratégie est associée à une grande incertitude, car il n’existe pas de traitements spécifiques pour toutes les maladies (l’association peut être assez aisée pour des pathologies chroniques comme le diabète, moins pour les maux de dos par exemple). Un autre défi a concerné les soins de longue durée en institution : il n’existe par exemple presque aucune donnée sur les maladies dont souffrent les résidents des maisons de retraite.

Le mot du Réseau Delta 

Les limites de l’étude, soulevées par les chercheurs eux-mêmes, soulignent le retard de la Suisse pour disposer des données ambulatoires de santé et pouvoir les traiter de manière optimale. Or celles-ci permettraient de réfléchir aux pratiques en vigueur et optimiser les processus de soins.

 

Stucki, M., Schärer, X., Trottmann, M. et al. What drives health care spending in Switzerland? Findings from a decomposition by disease, health service, sex, and age. BMC Health Serv Res 23, 1149 (2023).