Entre promesses politiques et réalité de terrain, les médecins de premier recours s'interrogent : à quand des actes concrets pour soutenir ceux qui portent notre système de santé au quotidien ? Dans ce billet d’humeur engagé, Dorian Schaller interpelle les décideurs politiques !
L'arrivée de Pierre Maudet à la tête du département de la santé marque une volonté de réorienter le système de santé vers une approche centrée sur la prévention et le renforcement des soins de première ligne. Un consensus semble se dessiner parmi les décideurs politiques, qui reconnaissent l'importance d'une organisation dans laquelle les médecins de premier recours, aux côtés d'autres acteurs, jouent un rôle central. Cette stratégie est perçue comme essentielle pour garantir un système de santé durable, accessible, de qualité et économiquement soutenable.
Pourtant, derrière les discours d'intention qui se répètent depuis un certain temps, offrant un narratif rassurant pour ceux qui le tiennent comme pour ceux qui s'en accommodent, les médecins de premier recours ressentent, paradoxalement et plus que jamais, un manque de soutien et de reconnaissance. Il faut dire que les récentes décisions, telles que la baisse du point tarifaire qui réduit leurs revenus, ainsi que la suppression de la « taxe urgente F », qui ne prévoit plus de majoration pour les consultations après 19h, de nuit ou le week-end, accentuent encore davantage le décalage perçu entre les discours bienveillants et les actions concrètes de soutien sur le terrain.
Cette situation engendre un profond sentiment d’incompréhension au sein d'une profession particulièrement dévouée à ses patients, qui supporte une charge de travail importante tout au long de la semaine, tout en affichant des revenus parmi les plus bas du secteur. Ce fort sentiment d’injustice, également d’ordre financier, menace aujourd'hui la qualité des soins offerts à la population, notamment en matière d'accessibilité, de temps disponible et de service aux patients. La déception est proportionnelle à l'investissement consenti, et l'on constate depuis un certain temps une érosion de la motivation au sein de la profession, motivation qui est pourtant essentielle pour assurer un engagement total envers les patients.
On le sait, le système de santé est difficile à réformer, et la plupart des décisions échappent aux compétences cantonales. Plusieurs réformes sont à bout touchant qui pourraient revaloriser la place du médecin de première ligne (EFAS, Tardoc). Toutefois, ces dernières, dont les effets sont d’abord difficiles à estimer, mettront ensuite du temps à porter leurs fruits. Et le temps, nous en avons peu, alors que les besoins de changement se font pressants.
Alors, mesdames et messieurs les décideurs politiques et présidents des associations professionnelles, il est plus que jamais essentiel de passer des discours aux actes et d’aligner les paroles avec les actions. Il est nécessaire d’envoyer un signal clair et concret à ces professionnels de première ligne, que vous reconnaissez tous comme indispensables pour relever les défis futurs de notre système de santé. Un tel message sera entendu par les plus jeunes, dont l’envie de s’engager dans cette spécialité est encore loin d’être acquise aujourd’hui !